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sentiel. Or, ce rapport prend autant de formes et autant d’aspects que peut en prendre la pensée. Car, dès que la pensée touche l’objet, celui-ci n’est plus un simple objet, mais l’objet pensé, ou, si l’on veut, l’objet idéalisé. Et ainsi la nature dans la pensée n’est plus la nature, mais la nature telle qu’elle se reflète dans la pensée, et telle qu’elle est transformée par elle. De là les différentes manières sous lesquelles on peut envisager la nature.

Et d’abord, si l’on considère l’homme, ou la pensée, ou l’absolu comme fin de la nature, celle-ci ne sera plus qu’un moyen et un instrument qui, comme tout instrument, n’a une valeur qu’autant qu’il sert à la réalisation d’une fin, c’est-à-dire qu’autant qu’il est utile. C’est là ce qui amène le point de vue utilitaire dans la science de la nature. Et ici l’on voit, pour le dire en passant, comment, lorsqu’on part de l’expérience, et qu’on considère l’expérience comme la base et le critérium de toute connaissance, on arrive à confondre la science avec la science de la nature, et l’on est ainsi amené à subordonner la science à l’utile, à n’accorder, voulons-nous dire, une valeur à la science qu’autant qu’elle est utile.

Mais la nature s’offre aussi à la pensée, soit comme un tout où les formes les plus variées, les plus riches et les plus gracieuses sont harmonieusement combinées, soit comme une force infinie, source inépuisable du mouvement et de la vie, du sein de laquelle sortent, et au sein de laquelle font retour tous les êtres. C’est là ce qui amène des points de vue plus élevés et désintéressés, la contemplation esthétique, voulons-nous dire, et théologique de la nature. La nature est belle, elle est divine,