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— Pas encore, âme sombre et désolée, répondit son interlocutrice ; accompagne moi d’abord avec ta torche, et aide-moi à chercher l’objet de mon amour et de mes regrets. Puis, quand l’espérance s’évanouira pour moi (si toutefois ce jour affreux arrive), alors, me rappelant ce que tu m’offres aujourd’hui, je reviendrai me coucher à tes côtés sur ce lit de feuilles mortes ou sur ces pierres nues et glacées. Alors, oh ! alors seulement, tu sauras ce que c’est d’être misérable. Mais jusqu’à ce que je sois bien convaincue qu’elle a disparu de la face de la terre, je ne veux même pas perdre le temps de me désoler. »

Hécate ne goûtait pas fort l’idée de s’exposer aux rayons du jour ; mais ensuite elle réfléchit que la désolation de Cérès la poursuivant sans relâche, même sous le ciel le plus éclatant, ce serait un aliment aussi puissant pour sa propre mélancolie que si elle persistait à rester au fond de sa caverne. Elle finit donc par consentir à l’accompagner. Elles partirent toutes deux, armées chacune de sa torche, malgré la splendeur de l’astre du jour. La lueur de ces deux torches avait quelque chose de sinistre, et semblait assombrir à tel point leurs figures, que les gens qu’elles rencontraient ne pouvaient clairement distinguer leurs traits. Cependant s’il leur arrivait d’entrevoir Hécate, la tête ceinte d’une couronne de reptiles, ils croyaient généralement qu’il était pru-