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Aussitôt que ce personnage s’aperçut de l’effroi de la jeune fille, il la pria de s’approcher un peu.

« Ne soyez pas effrayée, lui dit-il avec un sourire dont il paraissait avoir déjà plus d’une fois essayé l’effet. Venez… Ne voudriez-vous point occuper une place dans ce char à côté de moi ? »

La fille de Cérès était si émue, qu’elle ne désirait autre chose que de s’éloigner. Il n’y avait rien d’étonnant à cela. L’étranger ne portait point sur son front le cachet d’une âme sensible et généreuse, malgré son doux sourire ; et dans sa voix dominait un ton sévère, dont les accents résonnaient comme le bruit lointain d’un tremblement de terre. Semblable à tous les enfants qui seraient placés dans une telle circonstance, Proserpine pensa d’abord à appeler celle dont l’appui ne lui avait jamais manqué.

« Mère, mère chérie ! cria-t-elle toute tremblante. Viens vite à mon secours, viens me sauver ! » Mais sa voix trop faible ne pouvait parvenir aux oreilles de Cérès. Il était plus que probable que celle-ci se trouvait alors à quelques milliers de lieues occupée à faire croître le blé dans quelque contrée éloignée. Et quelle protection eût-elle pu offrir à la pauvre fille, quand même elle eût été à portée de l’entendre ? Car celle-ci n’eut pas plus tôt jeté un cri, que l’inconnu sauta à terre, la saisit dans ses bras, et, remontant soudain dans son