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un monceau de roses fraîchement cueillies, et abrité par un dais que les doigts seuls de Circé avaient pu tisser et broder. L’enchanteresse conduisit Ulysse par la main et le fit asseoir sur ce trône éblouissant ; puis, frappant dans ses mains, elle appela le sommelier en chef.

« Apporte, dit-elle, la coupe réservée aux rois, et remplis-la de ce vin délicieux qui réjouit le cœur de mon frère Aétès, la dernière fois qu’il vint me voir avec sa fille la belle Médée. Cette bonne et charmante enfant ! Plût aux dieux qu’elle me vît ici offrir ce vin généreux à mon noble visiteur !

— Est-ce une boisson salutaire ? » demanda Ulysse.

À cette question, un sourire effleura les lèvres des quatre jeunes filles ; mais leur maîtresse se tourna vers elle avec un air sévère, et répondit :

« C’est le jus le plus pur qui ait jamais été exprimé du fruit de la vigne ; car, au lieu d’altérer le caractère de l’homme, comme font ordinairement les autres liqueurs, celle-ci lui rend sa propre nature et le montre tel qu’il doit être. »

Le sommelier en chef n’aimait rien tant que de voir les gens transformés en porcs ou en toutes sortes de bêtes. Aussi mit-il le plus grand empressement à exécuter l’ordre de sa maîtresse. Il remplit la coupe royale d’un liquide aussi brillant que de l’or, qui pétilla jusque par-dessus les bords, en dé-