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tempêtes étaient tenues captives. Plus loin ils virent retracée leur fuite de chez le roi des Lestrygons, qui venait de saisir un de leurs camarades par la jambe. À l’extrémité de la tapisserie, on les apercevait assis sur les bords désolés de cette même île, affamés, abattus, et considérant d’un air lamentable les os dénudés du cerf qu’ils avaient dévoré la veille. Le travail s’arrêtait à ce dernier épisode ; mais la charmante et habile artiste se proposait de reprendre son œuvre et de continuer l’histoire des étrangers jusqu’au moment de leur arrivée.

« Voyez, dit-elle, je suis instruite de tous vos malheurs. N’ayez nulle inquiétude, je veux vous rendre heureux tout le temps que vous resterez avec moi. Aussi, mes braves hôtes, j’ai ordonné qu’on vous préparât un banquet. On vous servira poissons, volailles et viandes de toute espèce : le tout rôti à point, bouilli avec art, et assaisonné, j’espère, conformément à vos goûts. Si votre appétit vous annonce qu’il est maintenant l’heure de dîner, venez prendre place avec moi à la salle des festins. »

À cette bienveillante invitation, les marins affamés ne se sentirent pas de joie. L’un d’eux, se chargeant du rôle d’orateur, assura la libérale hôtesse que toute heure du jour était pour eux l’heure du dîner, pourvu qu’ils eussent de la viande à mettre au pot et du feu pour la faire cuire. La charmante maî-