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son col et ses cornes d’ivoire. Puis elle lui offrit quelques pousses d’herbe qu’il accepta et qu’il mangea, non comme un taureau affamé, mais comme pour montrer à l’enfant qu’il voulait lui plaire en accueillant avec plaisir ce qu’elle avait touché. En vérité, ce taureau était la créature la plus gracieuse, la plus douce et la plus belle que l’on pût imaginer, et l’on n’aurait pu trouver un compagnon de jeu plus aimable pour une petite fille.

Dès que le noble animal, pourvu d’une intelligence réellement étrange, s’aperçut qu’Europe n’éprouvait plus de frayeur, sa joie devint extrême. Il se mit alors à gambader de tous côtés dans la prairie, et à exécuter des bonds d’une légèreté comparable à celle d’un oiseau voltigeant de branche en branche. Il s’enlevait de terre avec une telle aisance, que vous l’eussiez cru capable de s’envoler dans l’espace. À peine si ses pieds laissaient leur empreinte sur l’herbe fine du gazon. D’une blancheur éclatante et sans tache, il ressemblait à un tourbillon de neige ballotté par le vent. Une fois, il s’emporta avec tant de rapidité et courut si loin, qu’Europe craignit de ne plus le revoir, et elle le rappela en criant de toutes ses forces :

« Reviens, oh ! reviens, charmant animal ; tiens ! voici une jolie fleur de trèfle. »

Et alors, il fallait voir la reconnaissance de l’agile taureau, qui exprima sa joie en bondissant