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Bellérophon tremblait de voir en vain s’écouler sa jeunesse, de sentir la vigueur de son bras et l’énergie de son courage s’épuiser peu à peu. Oh ! que le temps passe avec lenteur, quand un héros brûle de jouer un rôle sur la scène du monde et de se couvrir de lauriers ! Quelle leçon que celle de l’attente ! La durée de notre vie n’est qu’un songe ; mais combien il nous en coûte pour profiter de ce triste enseignement !

Bellérophon eut le bonheur d’inspirer au gentil petit garçon un affectueux attachement. L’enfant ne se lassait jamais de lui tenir compagnie. Chaque matin il savait ranimer dans l’âme de son ami la lueur d’espérance qui s’était affaiblie la veille. « Cher Bellérophon, lui criait-il en levant sur lui un regard plein de confiance, je crois que nous verrons Pégase aujourd’hui ! »

Sans la consolante assurance de son petit conseiller, Bellérophon, à bout de patience, fût reparti pour la Lycie, ou eût tenté de livrer bataille à la Chimère sans l’assistance du cheval ailé. Mais alors il s’exposait à être brûlé par le souffle du monstre, et il eût succombé sous ses horribles griffes.

Règle générale et absolue : personne ne doit attaquer une Chimère, née du limon des abîmes, sans s’être, au préalable, pourvu d’un auxiliaire aérien.