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Phœbé, — dans un terrain que les détritus végétaux avaient engraissé deux siècles durant. Mais bien qu’elles empruntassent leur vie aux corruptions de la terre, ces fleurs n’en envoyaient pas moins un pur et doux encens à Celui qui les avait créées, et en s’y mêlant, au moment où ce frais parfum montait le long de la fenêtre, le souffle virginal de la jeune Phœbé lui laissait toute sa pureté, toute sa fraîcheur. Précipitant ses pas sur l’escalier criard, dont aucun tapis ne protégeait les marches usées, elle glissa dans le jardin, cueillit quelques-unes des roses les plus intactes et les rapporta dans sa chambre.

La petite Phœbé possédait au plus haut degré le don des arrangements intérieurs, patrimoine exclusif de certaines personnes. C’est une espèce de magie naturelle qui permet à ces élus d’extraire, de tout ce qui les entoure, l’agrément caché, l’utilité secrète ; et plus spécialement de donner un aspect de confort à tous les lieux qu’ils habitent, si bref qu’y puisse être leur séjour. La hutte la plus sauvage, hantée par les voyageurs qui traversent une forêt vierge, prendrait un aspect hospitalier pour avoir abrité pendant une seule nuit quelqu’une de ces femmes douées ; et il se conserverait longtemps après la disparition de cet être si calme sous l’ombre épaisse des futaies voisines. Il fallait une bonne dose de cette sorcellerie domestique pour transformer, en quelque chose d’habitable, cette chambre de Phœbé où personne n’avait logé depuis si longtemps, — sauf les araignées, les rats et les fantômes. Comment elle s’y prit, nous ne le saurions dire. Aucun dessein préconçu ne se manifestait chez elle ; mais tantôt d’un côté, tantôt de l’autre, promenant ses maips agi-