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tabac d’Écosse — les épingles en place d’aiguilles, et vice versa, — la monnaie rendue à tort et à travers, quelquefois au préjudice du public, plus souvent au préjudice de la marchande, — et en somme, la journée finie, après tout ce pénible trafic, le tiroir, au grand étonnement d’Hepzibah, se trouva presque vide. Tant d’efforts avaient abouti à quelques pièces de cuivre parmi lesquelles un nine pence d’argent ou soi-disant tel, de mine fort suspecte, et qu’une épreuve décisive devait faire reconnaître, lui aussi, pour une monnaie de cuivre.

Mais à ce prix, et à tout prix, Hepzibah était charmée de voir clore cette néfaste journée. Jamais elle n’avait trouvé le temps si long, le travail si pesant ; jamais elle n’avait mieux apprécié cette sombre résignation, qui, dans son inertie obstinée, se laisse fouler aux pieds plutôt que de s’associer aux fatigues et aux soucis de la vie. Son dernier trafic eut lieu avec le petit marmot aux « bons-hommes » et à l’éléphant, qui maintenant voulait manger un chameau. Effrayée de cet appétit omnivore, Hepzibah lui offrit pêle-mêle tout ce qui restait de sa ménagerie de pain d’épice… Après quoi elle expulsa son petit client, enveloppa la clochette dans un bas à moitié fini, et replaça la lourde barre de chêne en travers de la porte.

Elle en était là, quand un omnibus vint s’arrêter sous les branches du vieil ormeau ; à cet aspect, Hepzibah sentit tressaillir son cœur. Le seul hôte qu’elle pût attendre devait lui venir des sombres régions d’un passé lointain et, de ce passé jusqu’à l’heure présente, pas un rayon de soleil n’était tombé ni sur lui