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le plus important de tous, ou celui du moins qu’il envisageait comme tel :

« Faites bon visage à vos pratiques, disait-il, et quand vous leur tendez la marchandise qui leur revient, tâchez de sourire agréablement !… Un article quelque peu avarié, si vous le retrempez dans la bonne chaleur d’un sourire, passera plus aisément qu’un article irréprochable accompagné d’une grimace effrayante. »

La pauvre Hepzibah répondit à ce dernier apophtegme par un soupir, venu de si loin et poussé d’une telle force qu’il faillit emporter l’Oncle Venner dans la rue comme une feuille sèche balayée par la brise d’automne. Un peu remis, cependant, il s’inclina vers elle et lui fit signe de se rapprocher de lui. Sur son visage flétri, en ce moment, une émotion sincère était peinte.

« Quand est-ce que vous l’attendez ? murmura-t-il.

— De qui parlez-vous ? demanda Hepzibah devenue pâle.

— Ah ! vous ne vous souciez pas d’en causer ? dit l’Oncle Venner. C’est bien… c’est bien, laissons cela, quoiqu’on en jase de tous côtés par la ville… Je me le rappelle, miss Hepzibah, ne pouvant pas encore se tenir sur ses jambes ! »

Pendant le reste de cette journée, la vieille fille, marchant comme dans un rêve, ne fonctionna plus que machinalement et sans porter la moindre attention à ses transactions commerciales. Le malheur ayant fait affluer la clientèle dans le petit magasin, il se commit, ce jour-là, des bévues fréquentes et considérables : les paquets de chandelles furent tantôt de sept et tantôt de douze au lieu de dix ; le gingembre fut vendu pour