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pauvre boutique, Hepzibah ferait alors bâtir un palais, et du haut de la tour la plus élevée jetant les yeux sur les monts et les vallées, sur les forêts, les champs et les cités, contemplerait avec orgueil la portion d’héritage à elle dévolue, de par ses glorieux ancêtres.

Telles étaient quelques-unes des fantaisies dont elle repaissait depuis longtemps son imagination, et c’est avec leur secours que les paroles fortuites de l’Oncle Venner, destinées simplement à l’encourager, venaient tout à coup d’illuminer au gaz, pour ainsi dire, les cellules pauvres et nues de ce cerveau malade. Mais, soit qu’il n’eût aucune idée de ces châteaux en Espagne, — et comment les aurait-il connus ? — soit que le froncement de sourcils de la vieille fille l’eût troublé dans ses souvenirs, ainsi que cela eût pu arriver pour un homme beaucoup plus intrépide, il perdit le fil de son discours ; revenant alors à un sujet moins intéressant, il se mit à conseiller Hepzibah sur les moyens de faire prospérer son commerce.

« Crédit est mort ! » — Nous citons ici quelques-unes de ses précieuses maximes. — « N’acceptez jamais de billets ! Ayez l’œil sur la monnaie qu’on vous rend. Faites sonner l’argent sur le poids de quatre livres ! Restituez les demi-pence à l’effigie anglaise et toutes ces mauvaises médailles de cuivre comme il en circule tant par la ville !… À vos moments perdus, tricotez pour les enfants des tours de cou et des mitaines !… Brassez vous-même votre levûre… Fabriquez vous-même votre bière au gingembre ! »

Puis, tandis qu’Hepzibah digérait de son mieux ces petites boulettes de sagesse, tant soit peu dures, qu’il venait de lui administrer, il couronna ses conseils par