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ton n’allait pas, et que de plus il était de mauvaise qualité ! » Il arriva aussi une femme au visage pâle et sillonné de rides profondes, vieillie avant l’âge, et dans les cheveux de laquelle, ainsi qu’un ruban d’argent, courait çà et là quelque raie grise ; une de ces femmes délicates par nature, et qu’on devine au premier coup d’œil épuisées par les mauvais traitements d’un mari brutal, — ivrogne sans doute, — ainsi que par l’éclosion d’au moins neuf enfants. Elle demandait quelques livres de farine, et présenta l’argent que la noble marchande refusa du geste, sans dire un mot, et après avoir fait meilleure mesure que si elle avait dû le prendre. Peu après, un homme se présenta, vêtu d’une jaquette de coton bleu couverte de taches, pour acheter une pipe ; non-seulement de son haleine échauffée, mais de toute sa personne s’exhalait, comme un gaz inflammable, une forte odeur d’alcool qui petit à petit envahit tout le magasin. Hepzibah se dit que ce devait être le mari de la pauvre épuisée ; il demanda un paquet de tabac, et comme elle avait négligé de s’approvisionner sous ce rapport, son grossier client lançant contre le mur la pipe dont il venait de faire emplette, sortit après avoir murmuré quelques paroles inintelligibles, qui avaient l’accent et l’amertume d’une malédiction… Hepzibah là-dessus lève les yeux, et envoie sans le vouloir, à la Providence suprême, un de ses regards les plus malveillants.

Dans le cours de l’après-midi, cinq individus, tout autant, vinrent chercher diverses espèces de bière, et n’en trouvant aucune, s’en allèrent fort mécontents. Trois de ces manants laissèrent la porte ouverte, et les deux autres la tirèrent avec un mouvement de rancune