Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/363

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avait toujours inspiré une répugnance mêlée de dédain. Il n’est pas sûr, soyons juste, qu’il prétendît impliquer ainsi Clifford dans une accusation de meurtre. Sachant bien que son oncle n’avait pas péri de mort violente, il ne devait pas prévoir, en un pareil moment de crise, les conclusions précipitées auxquelles le public en viendrait à ce sujet ; toutefois, lorsque l’affaire eut pris ce tour sinistre, Jaffrey se trouvait déjà sur une voie où il n’était guère possible de reculer, et les circonstances avaient été si bien ménagées par lui que, devant les juges de Clifford, son cousin n’eut pour ainsi dire pas à porter un faux témoignage ; il put se borner à ne pas donner les explications décisives qu’aurait fournies le récit exact de ce qu’il avait vu, de ce qu’il avait fait.

Ceux qui connaissent le cœur humain s’expliqueront, à l’aide de ces nuances, comment le crime perpétré par Jaffrey Pyncheon au détriment de Clifford, — si noir et si condamnable qu’il fût en réalité, — ne lui apparaissait plus, à la longue, que comme un péché véniel, une fragilité de jeunesse très-suffisamment expiée par une foule de bonnes œuvres. — Le digne magistrat n’y pensait d’ailleurs que fort rarement.

Laissons maintenant le Juge à son repos éternel. À l’heure de sa mort, sa longue prospérité parut se démentir, car au moment où il essayait d’augmenter l’héritage probable de son fils, il venait de perdre, sans le savoir, cet enfant unique. Une semaine tout au plus après son décès, un des steamers de la Compagnie Générale apporta la nouvelle que le fils du juge Pyncheon était mort du choléra, juste au moment où il allait s’embarquer pour revenir dans son pays natal. Ce malheur faisait de Clifford un homme riche ; Hep-