Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/341

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et si le petit singe à longue queue, ce Mammon ridicule, verrait enfin, après tant et tant de révérences, tomber un pauvre cent dans la paume de sa main noirâtre ; mais pour nous, qui savons tous les secrets de la maison devant laquelle se déroule ce petit drame des rues, il y a dans cette répétition continuelle de mélodies populaires, sautillantes et vives au seuil du grand hôtel sombre, un contraste saisissant pour l’esprit. Voyez plutôt l’étrange scène, si tout à coup se montrait sur le seuil, avec sa chemise sanglante et son blême visage, le juge Pyncheon en personne, écartant du geste le jeune vagabond étranger !… Mais ce contraste du familier et du tragique, de la danse et du trépas, des marionnettes et du cadavre, on le retrouve à chaque jour, à chaque heure, à chaque minute, — et nous ne nous y arrêterons pas davantage.

Avant que l’Italien n’eût fini, deux ouvriers vinrent à passer, qui s’en allaient prendre leur repas.

« Vous feriez mieux, mon petit Français, cria l’un d’eux, de laisser là cette porte et d’aller vous établir ailleurs avec toutes vos drôleries… Ceci est le logis de la famille Pyncheon, et je vous assure qu’ils n’ont pas le cœur à la musique. Le bruit court, par toute la ville, que le juge Pyncheon, propriétaire de la maison, a été assassiné cette nuit-ci. Notre City-marshal, le chef de la police municipale, vient justement s’enquérir du fait… Déguerpissez donc, et rondement ! »

Au moment où l’Italien chargeait sur ses épaules sa boîte à musique, il vit sur la première marche du perron une carte qui était restée là toute la matinée, recouverte par le journal, et qui, celui-ci écarté, venait de se trouver en vue. Il la ramassa, et voyant qu’elle