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mois un des pignons les plus écartés ; — maison séparée, à vrai dire, que mainte porte munie de serrure, de verrous, et de barres de chêne isolait du corps de logis principal. Par conséquent, les soupirs orageux de Miss Hepzibah ne pouvaient s’entendre, non plus que le craquement de ses genoux roidis alors qu’elle s’agenouilla près de sa couchette, ni la prière gémissante qu’elle murmurait à voix basse en implorant l’Être céleste pour toute la durée du jour qui allait poindre. Miss Hepzibah s’attendait sans doute à quelque rude épreuve, elle qui depuis un quart de siècle vivait dans une stricte réclusion, ne prenant aucune part ni aux affaires ni aux plaisirs de la vie. Ce n’est pas avec une telle ferveur que prie le reclus engourdi, quand il n’a devant lui que le calme froid et stagnant d’une journée semblable à toutes celles qu’il a vues, l’une après l’autre, tomber dans les gouffres du Passé.

L’antique demoiselle a terminé ses dévotions. Va-t-elle franchir le seuil de notre récit ? Pas encore. Elle prend son temps, il faut l’attendre. Il y a d’abord à ouvrir le vieux bureau, — tiroir par tiroir, non sans difficultés, non sans une succession d’efforts spasmodiques ; — et tous ces tiroirs devront se refermer de même, offrant autant de résistance et d’obstacles surmontés à grand’peine. Puis on entend bruire un épais tissu de soie ; des pas traînants vont çà et là par la chambre. Nous soupçonnons Miss Hepzibah de monter sur un fauteuil pour se mieux voir de tous côtés, et de la tête aux pieds, dans le miroir ovale, au cadre terni, qui domine sa table de toilette. C’est, ma foi, cela, — et qui l’eût pensé ? Tant de précieuses minutes devaient-elles