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à la maison je ne sais quelle physionomie méditative, indiquant les secrets qu’elle garde, les nombreux incidents qu’elle pourrait offrir au moraliste comme sujet de ses observations. Dans ses murs vieillis dont le plâtre s’émiette et laisse voir le bois des charpentes, en chêne blanc, tant d’hommes ont vécu, il a passé tant de misères et tant de joies, que les poutres massives elles-mêmes semblent comme imbibées de cette substance qui fait le cœur humain. On pourrait dire également de la maison qu’elle est une espèce de cœur aux proportions gigantesques, ayant sa vie propre et plein de réminiscences éclatantes ou sombres.

Devant la porte, juste au bord d’un trottoir sans pavés, avait grandi l’Orme-Pyncheon qui, par rapport aux autres arbres de son espèce, pouvait être qualifié de géant. Planté par un arrière-petit-fils du premier Pyncheon, il conserve encore, bien qu’âgé de quatre-vingt ans et plus, sa puissante maturité ; son ombre se projette sur toute la rue ; il domine les Sept Pignons et, de son feuillage traînant, balaye la totalité du toit noirci. Un reflet de sa beauté tombe sur le vieil édifice, et semble faire de lui une œuvre de nature. À droite et à gauche s’étend une barrière de bois fort délabrée, à travers les interstices de laquelle s’entrevoit une cour envahie par l’herbe, et où croissent, surtout à l’angle du bâtiment, des bardanes énormes. Derrière la maison un jardin, jadis assez vaste, mais limité depuis, et encombré par les constructions d’une rue voisine. N’oublions, pour achever le tableau, ni la mousse verte accumulée sur les reliefs des croisées et sur les pentes du toit, ni un groupe de fleurs, venues on ne sait comment à peu de distance de l’énorme cheminée et au