Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/204

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servir de type à une nombreuse catégorie de ses hardis compatriotes.

Ce qu’il deviendrait, il n’était pas facile de l’annoncer. Par certaines qualités, il semblait promis au succès ; mais, sur tous les degrés de l’échelle sociale, que de jeunes gens ne rencontrons-nous pas dont il semble que nous puissions espérer merveilles, et dont ensuite il nous arrive de ne jamais plus entendre parler ! Pareils à certains légers tissus, leur lustre et leurs vives couleurs tiennent mal contre le soleil et la pluie ; le premier lavage fait disparaître le faux brillant qui les abusait, eux-mêmes et les autres. N’oublions pas cependant qu’il s’agit d’Holgrave, — non tel qu’il serait plus tard, — mais tel que nous le voyons ce soir-là, sous la tonnelle du jardin Pyncheon, causant avec Phœbé de la manière la plus intime, et sans aucun vestige de cette froideur qu’elle lui avait tant de fois reprochée. Elle possédait à ses yeux le charme d’une onde pure et limpide. Il croyait la connaître telle que Dieu l’avait faite, et la déchiffrer avec aussi peu de peine qu’un livre à l’usage des enfants. Mais ces transparentes natures nous trompent souvent sur leur profondeur ; ces cailloux, que nous distinguons au fond de l’eau, sont plus loin de notre œil que nous ne l’aurions cru. Quoi qu’il en soit, l’artiste, cédant au charme silencieux de Phœbé, déroulait librement devant elle ses plans d’avenir. Peut-être croyait-il se parler à lui-même ; peut-être oubliait-il complétement la personne à laquelle ses propos s’adressaient. Et cependant, si vous les eussiez lorgnés par quelque interstice de la palissade qui, du côté de la rue, fermait le jardin, l’attitude du jeune homme et l’éclat passionné