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offerts ; il craignait peut-être que, jouet d’un rêve, ce gracieux tableau ne vînt à s’évanouir devant ses yeux.

« C’est charmant, c’est délicieux, murmurait-il sans s’adresser à personne… Mais cela va-t-il durer ? Quel air embaumé par cette fenêtre ouverte ! Comme ces feuillages sont éclaires ! Comme ces fleurs sentent bon !… Et ce visage de jeune fille, quel éclat, quelle sérénité radieuse !… C’est la fleur encore sous la rosée et reflétant la lumière du ciel… Ah ! tout ceci doit être un rêve !… Un rêve ! Un rêve !… Mais il me dérobe tout à fait les quatre murs de granit ! »

Son visage s’obscurcit, à ces mots, comme si l’ombre d’une caverne ou d’une prison y fût tout à coup tombée. Phoebé (dont l’humeur active et prompte ne se prêtait guère à rester spectatrice inerte d’une situation quelconque, et qui intervenait volontiers, généralement avec succès), Phœbé se sentit entraînée à prendre la parole.

« Voici, dit-elle à l’étranger en lui offrant une petite rose rouge prise dans le vase de fleurs, une espèce nouvelle que j’ai découverte ce matin même, au jardin ; l’arbre n’en portera pas plus de cinq ou six dans toute la saison… De toutes, c’est à coup sûr la plus parfaite… Voyez plutôt !… Pas une tache de nielle ! Et quelle odeur !… C’est à ne l’oublier de sa vie…

— Ah ! voyons !… Donnez vite ! s’écria le convive s’emparant avidement de la fleur, qui par ce charme particulier des parfums qu’on se rappelle, évoquait autour de lui d’innombrables souvenirs… Merci, mille fois… Si vous saviez quel bien elle me fait !… Je me souviens du goût que j’avais pour ces roses, — il y a bien longtemps, j’imagine ; — peut-être aussi