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On le voyait à son sourire involontaire quand il regardait Phœbé, dont la fraîcheur et l’innocence virginale résumaient à la fois l’essence de la lumière et celle des fleurs. Enfin cet amour, cette soif du beau, se trahissaient encore dans la précaution instinctive avec laquelle ses regards, une fois détournés d’Hepzibah, évitaient de reprendre leur ancienne direction. C’était un malheur pour elle, — mais Clifford n’avait aucun reproche à se faire. Flétrie et ridée comme elle l’était, avec ce triste maintien, ce turban grotesque, cette grimace hideuse, comment aurait-il pu se complaire à la regarder ? D’accord, direz-vous, mais en échange de cette affection silencieuse qu’elle lui témoignait, ne lui devait-il donc aucune tendresse ? Non, Clifford ne lui devait rien. Une nature de cette espèce ne contracte jamais de pareilles dettes. Elle est égoïste par essence, elle suit sa voie, elle obéit à sa destinée ; elle exerce un droit primordial qu’il faut savoir reconnaître, et en vertu duquel nous devons lui prodiguer, sans espoir de retour, tout ce que l’affection a de plus héroïque et de plus désintéressé. C’est ce que faisait la pauvre Hepzibah, cédant elle aussi aux instincts de sa belle âme, et se réjouissant, en toute sincérité, — bien qu’avec un soupir et l’espoir secret de verser quelques larmes quand elle serait seule, — de ce que son pauvre Clifford, longtemps sevré de toute beauté, avait maintenant mieux à contempler que son visage sévère et triste, dévasté par les chagrins qui lui venaient de ce frère idolâtré.

Lui, cependant, s’était rejeté dans son fauteuil. On le voyait chercher, avec une espèce d’effort, à savourer pleinement chaque détail des plaisirs qui lui étaient