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« Si vous l’aviez pour agréable, continua-t-il, je vous déléguerais volontiers le soin de ces fleurs et de ces respectables volailles. Enlevée comme vous venez de l’être à la besogne des champs, vous éprouverez bientôt le besoin de ces travaux en plein air… Quant à moi, je ne suis jardinier fleuriste que par occasion… Soignez donc, arrangez à votre gré les plates-bandes du parterre ! Je ne vous demanderai qu’une rose, par-ci par-là, pour me payer les excellents légumes dont je prétends enrichir la table de miss Hepzibah ; nous nous trouverons ainsi collaborer, à peu près selon les règles de l’Harmonie sociétaire. »

Sans répondre, et quelque peu surprise de se trouver si obéissante, Phœbé se mit à sarcler une des planches de fleurs. Mais, pendant ce travail, elle se préoccupait surtout du jeune homme avec qui elle se trouvait, si à l’improviste, sur le pied d’une familiarité surprenante. Il ne lui plaisait que médiocrement. Son caractère embarrassait la petite campagnarde comme il eût embarrassé maint observateur tout autrement expérimenté ; en effet, sa conversation, généralement badine, n’en laissait pas moins sur l’esprit de la jeune fille une impression de gravité, de sévérité à peine tempérée par l’âge de son interlocuteur. Elle se révoltait, d’ailleurs, contre l’influence d’une sorte d’élément magnétique, partie intégrante de cette organisation d’artiste, et qu’Holgrave exerçait sur elle, peut-être sans en avoir conscience.

Bientôt, le crépuscule, aidé par l’ombre des arbres et des bâtiments voisins, emplit le jardin d’une obscurité toujours croissante.

« Le moment est venu, dit Holgrave, de quitter le