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riez, il déplore sa mort, il plaint sa veuve, ses enfants, l’État ; il se plaint lui-même : il a perdu un bon ami et une grande protection… Si l’on attaque cette place, continue-t-il, on lèvera le siége ; ou l’on demeurera sur la défensive sans livrer de combat, ou, si on le livre, on le doit perdre ; et si on le perd, voilà l’ennemi sur la frontière. Et, comme Démophile le fait voler, le voilà dans le cœur du royaume : il entend déjà sonner le beffroi des villes et crier à l’alarme ; il songe à son bien et à ses terres. Où conduira-t-il son argent, ses meubles, sa famille ? Où se réfugiera-t-il ? En Suisse ou à Venise ? — Mais, à ma gauche, Basilide met tout d’un coup sur pied une armée de trois cent mille hommes ; il n’en rabattrait pas une seule brigade : il a la liste des escadrons et des bataillons, des généraux et des officiers ; il n’oublie pas l’artillerie, ni le bagage. Il dispose absolument de toutes ces troupes… il sait ce qu’elles feront et ce qu’elles ne feront pas : vous diriez qu’il ait l’oreille du prince ou le secret du ministre… Une autre fois il accourt tout hors d’haleine, et après avoir respiré un peu : Voilà, s’écrie-t-il, une grande nouvelle ! Ils sont défaits, et à plate couture ; le général, les chefs, du moins une bonne partie, tout est tué, tout a péri ! Voilà, continue-t-il, un grand massacre, et il faut convenir que nous jouons d’un grand bonheur ! Il s’assied, il souffle, après avoir débité sa nouvelle, à laquelle