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Oronte, à qui Lucidas, le rédacteur du Mercure, a cédé momentanément et sa maison et son emploi pour assurer la réussite de ses amours.

Je te l’ai déjà dit, l’une de nos surprises,
C’est de voir tant de gens, dire tant de sottises.
Lucidas est le seul, délicat comme il est,
Qui puisse avec tant d’art démêler ce qui plaît.
Depuis deux ou trois jours que je le représente
Je ne vois que des fous d’espèce différente.
L’un, qui veut qu’on l’imprime et n’a point d’autre but,
Croit que hors du Mercure il n’est point de salut.
L’autre, dans la musique ayant quelque science,
Croit de celle du Roi mériter l’intendance.
Celui-ci, d’une énigme ayant trouvé le mot,
Se croit un grand génie, et souvent n’est qu’un sot.
Cet autre, d’un sonnet ayant donné les rimes,
Croit tenir un haut rang chez les esprits sublimes.
Enfin, pour être fou, j’entends fou confirmé,
À l’envi l’un de l’autre on veut être imprimé.
As-tu chez le libraire appris quelques nouvelles ?

Merlin

Oui, Monsieur.

Oronte

Oui, Monsieur.Et de qui ?

Merlin

Oui, Monsieur. Et de qui ?D’un commis des gabelles
Qui, n’ayant pu trouver les profits assez grands,
A fait un petit vol de deux cent mille francs…

Oronte

Cela, qu’est-ce ?

Merlin

Cela, qu’est-ce ?Un portrait d’une jeune duchesse
Qui se fait distinguer par sa délicatesse.