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l’honneur de de Visé ; il rend même justice à ses bonnes qualités, et le représente comme un homme désintéressé ; c’est même moins contre le Mercure que contre les passions qu’il mettait en mouvement que s’exerça la verve de Boursault ; il a soin de s’en expliquer lui-même dans un avertissement placé en tête de la dernière édition de sa comédie : « Mon dessein en faisant cette pièce de théâtre n’a pas été de donner atteinte à un livre que son débit justifie assez, mais seulement de satiriser un nombre de gens de différents caractères qui prétendent être en droit d’occuper dans le Mercure galant la place qu’y pourraient légitimement tenir des personnes d’un véritable mérite. Je croirais avoir rendu un service important à son auteur, et même à ceux dont je vais parler, si j’avais fait des portraits assez ressemblants pour épargner à l’un la peine d’écouter tant de sottises, et aux autres la honte de les dire[1]. »

Nous citerons quelques scènes de cette comédie, qui nous ont paru présenter un intérêt à la fois moral et littéraire.

  1. Boursault, dans sa jeunesse, s’était lui-même essayé au métier de gazetier. Il rédigea quelque temps une gazette en vers qui eut un grand succès à la cour, et lui valut une pension de 2,000 francs. Mais s’étant avisé un jour de rimer une aventure galante arrivée à un capucin, sa gazette fut supprimée, sur les plaintes du confesseur de la reine, et sans la protection du grand Condé il aurait été envoyé à la Bastille. Quelques années après il entreprit une autre gazette, qui fut encore supprimée pour deux méchants vers contre le roi Guillaume d’Orange. La France était alors en guerre avec ce prince, et Boursault, en l’attaquant, avait cru faire acte de bon courtisan ; mais il se trouva, malheureusement pour le gazetier inconsidéré, que Louis XIV songeait en ce moment à faire la paix.