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et qui les articule dans un procès solennel. Mais ce n’est pas tout. Voulez-vous savoir jusqu’où allait la rare subtilité de ces graves docteurs ? Suivez bien ce raisonnement : « L’origine et les mœurs de Renaudot sont à considérer : il est né à Loudun, où il est certain, de par Laubardemont, que les démons ont établi leur domicile ; il a témoigné avoir une partie de leurs secrets et de leurs ruses. En effet, Tertullien remarquait dans son Apologétique, — on cite le passage[1], — deux circonstances qui avaient mis le diable en crédit : le débit des nouvelles et celui des recettes pour les maladies. » Or, Renaudot est gazetier, il veut être empirique, il est né à Loudun : donc, etc.

Et c’est au milieu du XVIIe siècle, en plein conseil, que se débitaient de pareilles sottises ! Il faut dire aussi que le bûcher d’Urbain Grandier était à peine éteint. Comment s’étonner alors que Renaudot ait succombé sous de telles accusations !

Puisque ce nom d’Urbain Grandier est venu sous notre plume, disons, à l’honneur de Renaudot, que, bien qu’il ne pût ignorer quelle main frappait son infortuné compatriote, il ne craignit pas de composer son éloge et de le faire distribuer dans Paris.

  1. Quidquid ubique geratur tam facile sciunt (dæmones) quam enuntiant... Venefici planè circà curas valetudinum.

    Si ces arguments ne sont pas de Guy Patin, l’instigateur de ce débat retentissant, ils sont bien dignes de lui par leur sel et leur malignité.