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qu’un bout de papier où la main tremblante de Mme Muller avait tracé :

Mille pardons, M’sieur le patron, vous ne me verrez plus, je vais me jeter par la fenêtre.

C’est ainsi qu’elle essaya de traduire son humiliation de logeuse repentante, après la regrettable histoire du lit loué au portier.

— Quelle blague ! dit simplement Chvéïk, et il attendit.

Une demi-heure après, Mme Muller entra à pas de loup dans la cuisine, et, à son visage désolé, Chvéïk put bien voir qu’elle attendait ses consolations.

— Si vous voulez vous jeter par la fenêtre, dit Chvéïk, allez plutôt dans ma chambre, j’ai ouvert la mienne. Vous jeter par la fenêtre de la cuisine, ça n’a aucun sens et je ne vous le conseille pas. Dans le jardin où vous tomberiez, il y a des roses, vous pourriez les abîmer et il faudrait les payer. À quoi bon, alors, n’est-ce pas ? Au contraire, de la fenêtre de ma chambre, vous serez tout à fait à votre aise : vous tomberez sans faute sur le trottoir, et, si vous avez de la chance, vous vous casserez le cou. Si vous n’avez pas de veine, vous risquez seulement de vous casser les côtes, les bras et les jambes, et vous aurez des frais d’hôpital.

Mme Muller fondit en larmes, alla fermer, sans un mot, la fenêtre de la chambre et, revenue à la cuisine, elle dit :

— Cette fenêtre-là faisait un courant d’air, et ça ne vaut rien pour les rhumatismes de M’sieur le patron.

Puis, elle retourna dans la chambre pour faire le lit et pour remettre tout en ordre. Quand elle eut