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nora l’énigmatique

mière sensation d’Italie. Tu me diras que San-Remo, c’est merveilleux. Si… Si… Mais je n’avais pas le cœur à m’amuser ni à contempler le paysage.

À l’hôtel, un voyageur me remarqua. Il s’arrangeait pour se trouver sur mon passage, pour m’ouvrir la porte, pour se faire voir. Jeune, le type du militaire en civil, bien élevé mais avec quelque chose de raide, de cassant, il était évidemment étranger. Je voyais son manège et commençais à m’en amuser. Quand il saisit un prétexte pour entamer la conversation, je ne l’ai pas repoussé. J’appris qu’il était allemand, officier en permission disait-il, me laissant entendre tout de même qu’il ne se bornait pas à s’amuser. Je finis par conclure que sa permission était plutôt une… mission. C’était assez mystérieux, mais je ne m’y intéressais que médiocrement. Tout de même, je constatai qu’il avait des relations à l’état-major italien et même à la police italienne. Une idée me vint. Comme il se montrait de plus en plus empressé et qu’il semblait avoir pour moi un cercine… je veux dire le béguin…

— Tu as dû en soulever des passions ! s’exclama Édouard à ce point.

— Pas tellement, répliqua Nora. Lui, il était pris… Je résolus de me servir de lui pour sortir d’Italie… Lui cachant mes véritables idées, car j’avais appris à me méfier des fascistes et surtout des nazis qu’aucun sentiment ne retient, je le priai de presser mon départ, invoquant que mes auditoires m’attendaient en France. Il s’y prêta de bonne grâce et il obtint un succès dont la rapidité m’a étonnée…

Je devais le revoir ! Cet Allemand se nommait Ludwig Sudermann.