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LA VIE EXTÉRIEURE.

— Viens mourir à mes pieds, pauvre vague en courroux :
Hurle, tords-toi, bondis, jette ton flot qui gronde
Sur le rempart massif des roches aux flancs roux :
Ta rage, morte au choc des granits qu’elle inonde,
Ruisselle sur leur mousse et filtre dans leurs trous.

 
Je songe aux travailleurs de l’idée inflexible :
À tous ceux qui voulaient, luttaient, fermes et forts ;
Dont l’âme, aux premiers jours, se croyait invincible,
Et qui, las, sont venus broyer leurs vains efforts
 Aux durs brisants de l’impossible !


— Emblème des vaincus dont tu chantes le vœu,
Ô Mer, use sans fin tes digues inusables !
Pleure éternellement sous le ciel toujours bleu.
Sœur des souffrants, sœur des damnés, meurs sur les sables,
Comme nos désespoirs meurent aux pieds de Dieu !