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— Se jeter, là dedans, la face la première ! Je n’aurais même pas le temps de le savoir !

Le rayonnement du brasier lui cuisait le visage.

— J’aurais certainement, moins qu’ici, de souffrance physique… Vrai, la mort est une banalité, une réputation surfaite !… La peur d’elle n’est pas un instinct, car des peuples entiers l’ont ignorée… La douleur d’elle n’est qu’une fantaisie de notre imagination, qui croit à la nécessité de souffrir beaucoup pour mourir, puisque l’on souffre tant sans pouvoir en mourir. La véritable mort est dans la résignation au trépas : difficile, d’où lutte, d’où sanglots et terreurs d’agonie… Mais, moi, je suis déjà mort, puisque je suis désireux de l’être, intimement mort… Un pas manque, rien de plus.

Il revint au pied du cône et s’assit encore : les masses ignées pleuvaient autour de lui. Une donc ne le traverserait pas, trouant sa chair d’une boule de feu ? Il la renfermerait dans ses entrailles grésillantes, et ce serait fini !

Tout à coup, il se précipita à l’escalade du volcan. Les guides stupéfaits l’appelaient à grands cris. Georges se lança à sa poursuite, et les guides derrière eux. Pierre montait, sauvage, des pieds, des genoux, des mains ; il râlait dans les fumerolles. La pluie de laves se faisait plus dense.

— Encore !

Georges, dans les vapeurs, ne le distingua plus.

Là bas, les gens criaient.