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Tout paraissait devoir se borner à un blocus peu redoutable aux yeux de d’Espremenil, qui gardait par la mer la sécurité des communications avec Pondichéry, lorsque le cours d’eau qui abreuvait Madras diminua de volume et tarit brusquement. Maphiskan, le général d’Anaverdikan, qui n’ignorait pas la faiblesse de la garnison et prenait la temporisation de d’Espremenil pour de la peur, mais qui n’osait pas donner l’assaut au rempart, dont les angles mystérieux lui semblaient receler des pièges, en vrai stratège hindou, comptant plus sur la soif que sur le canon, après des prodiges d’activité et de travail, avait réussi à construire une digue sur le Montaron et à le rejeter dans son ancien lit.

Le manque d’eau, tourment insupportable sous ce ciel de feu, excita la fureur des soldats, ébranlés quelques jours auparavant à la vue de cette multitude de sabres qui scintillaient dans la plaine. Sur l’ordre de Dupleix, d’Espremenil fit sortir de Madras un corps de 400 hommes, avec deux pièces d’artillerie. Les troupes se formèrent en bataille dans la plaine, masquant les canons ; elles étaient à peine développées et en marche, que la cavalerie du nabab se rassembla pour charger. L’énorme escadron s’ébranla, semblant devoir tout broyer sous sa masse. Il arrivait comme une avalanche, quand brusquement les Français firent un mouvement de demi-conversion à droite et à gauche, démasquant ainsi les pièces. On entendit une détonation, et deux trouées sanglantes se creusèrent dans la colonne ennemie, qui éprouva un moment de trouble et d’hésitation. Les cavaliers d’Anaverdikan reprenaient à peine