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je puis sortir d’ici sans manquer à ma parole », et il proposait l’évacuation pour janvier. Le conseil trouvait la date de l’évacuation trop rapprochée ; au fond il ne voulait pas de date fixée, il préférait une formule plus élastique et proposait celle-ci : la place ne sera remise à la Grande-Bretagne qu’après le partage équitable du butin. On demandait en outre à La Bourdonnais de laisser cent cinquante hommes de ses troupes, pour les joindre à celles de Pondichéry et former ainsi la garnison de la place, dont d’Espremenil serait tout d’abord reconnu gouverneur.

On en était là des négociations, quand dans la nuit du 13 au 14 octobre se déchaîna sur la rade de Madras, où la flotte était à l’ancre, le plus terrible ouragan. Aux premières secousses de la tempête, La Bourdonnais donna l’ordre de couper les amarres des navires. L’escadre flottait sans entrave quand le vent s’abattit sur elle. Il l’emporta vers la haute mer avec la vitesse d’un boulet. Des lumières apparurent un instant sur les eaux, quelques coups de canon résonnèrent encore, puis on n’entendit plus que le rugissement du vent et des vagues. Grâce au coup d’œil et à la hardiesse de La Bourdonnais, les navires ne s’étaient pas brisés sur la côte. Mais qu’allaient-ils devenir ? La tourmente continua toute la nuit et tout le jour. La Bourdonnais, resté à terre, disposa les secours avec la plus grande intelligence. On ne savait rien de l’escadre. Les épaves affluaient à la côte. L’incertitude et l’angoisse durèrent jusqu’au 16. Ce jour-là, on apprit toute l’étendue du désastre. Des huit vaisseaux dispersés par la tempête, quatre avaient coulé ; deux étaient entièrement démâtés ;