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pouvait douter qu’on voulût pousser les choses à toute outrance, et qu’il prendrait les mesures les plus énergiques pour arrêter les menées séditieuses. L’envoyé de Dupleix, intimidé, disait doucement à l’énergumène que le gouverneur de l’Inde n’avait jamais pensé à une lutte fratricide ; il lui montrait que la phrase, cause de tout cet orage, était simplement une allusion au sacrifice qu’il faudrait faire plus tard pour reprendre Madras aux Anglais, quand l’entêtement de La Bourdonnais le leur aurait rendu. Il lui lisait cet extrait des ordres envoyés le 6 de Pondichéry : « Il est essentiel de ne se retirer que contraint ; mais ayez toujours devant les yeux qu’il vaut mille fois mieux se retirer que verser le sang français. » Tous ces discours étaient superflus.

La Bourdonnais était trop intelligent pour ne pas penser comme Bury. Il savait très-bien que la guerre civile, personne à Pondichéry n’en avait même l’idée. Mais il avait en main un bon prétexte. Il criait donc de plus belle et s’emportait plus fort : « Je mettrai à la voile, s’écriait-il, et tenant Pondichéry sous mes canons, je ferai plier l’orgueil de ce marchand. » Il y pensa sérieusement, et peu s’en fallut qu’il ne prît ce parti. Enfin et en manière de conclusion, il annonçait brusquement à Bury qu’il le mettait en état d’arrestation, lui et tous les officiers du contingent de Pondichéry. Le lendemain, c’était le tour de Desmarets et de Paradis qui, malgré leur résistance, rejoignaient Bury dans sa prison. D’Espremenil, Dulaurens, Barthélemy sortaient de Madras au plus vite. Tout le conseil était donc en fuite ou prisonnier.