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avait des chances pour terminer la campagne en un jour, si un assaut imprévu et vigoureusement mené réussissait ; mais aussi on courait le risque d’essuyer une défaite, dont les conséquences seraient terribles, puisque l’ennemi détenait les forteresses qui fermaient la route à une armée en retraite sur Pondichéry. C’était trop risqué. Valait-il mieux, au contraire, nettoyer le Carnate des ennemis qui s’y étaient établis, reprendre les places principales de cette région, et cela fait, sûr de ses derrières, marcher à l’attaque de Trichinapaly ? Ce mouvement était évidemment le meilleur. Dupleix prit la résolution de l’exécuter, en songeant que cette opération lui fournissait le moyen de rétablir le prestige de la France devant les Hindous par une série de petites victoires à peu près certaines. Un autre motif exerça aussi grande influence sur sa décision : la nécessité d’aguerrir les troupes, et celles-ci en avaient besoin !

Rarement on en avait vu d’aussi mauvaises. Parmi les officiers, il y en avait peu, ou pour mieux dire pas du tout, qui fussent en état de commander. Ce n’était pas la bravoure qui leur manquait, mais les talents ; c’étaient des enfants, sans la moindre teinture du service. Ils ne possédaient aucune autorité sur leurs hommes, qui se moquaient de leurs chefs. Quant aux soldats, on ne pouvait faire aucun fond sur eux. Les dernières recrues arrivées étaient, selon l’expression même de Dupleix, un ramassis de la plus vile canaille. Au lieu d’imiter les Anglais, de lever des Suisses, de choisir dans les bataillons d’infanterie régulière des volontaires aguerris, l’agent de la Compagnie chargé du recrutement empochait la plus forte partie des