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brisé leur sceptre. Le pouvoir souverain passait tout entier aux marchands si méprisés naguère ; les Européens devenaient les producteurs désignés des Mongols. On cessa de murmurer contre les « témérités du gouverneur ». On commença à reconnaître le génie de Dupleix.

Celui-ci, délivré de tout danger du côté du nabab, se retourna vers les Anglais. Réduits à deux cents hommes sur la côte de Coromandel, ces derniers n’avaient pu tenter aucune diversion en faveur d’Anaverdikan ; ils se tenaient renfermés derrière les remparts du fort Saint-David. Située à environ douze milles sud de Pondichéry et à deux milles au nord de Gondelour, cette forteresse avait été achetée par les Anglais en 1691, et petit à petit fortifiée. Elle avait la forme d’un pantagone régulier et avait une enceinte bastionnée assez solide. Elle était bâtie dans la vallée où coule le Pounar, proche cette rivière. Le fort Saint-David était devenu dans ces régions l’unique centre de résistance de l’Angleterre. Avant de l’en chasser, Dupleix voulut en finir avec l’affaire de Madras. Il fit publier dans cette ville une proclamation qui déclarait Madras possession française par droit de conquête et répudiait « comme nuls et non avenus » les engagements de La Bourdonnais. Quoi qu’en dise la légende inventée par ce dernier, on eut tous les égards pour les Anglais prisonniers, et ceux qui réussirent à gagner le fort Saint-David ne s’enfuirent pas devant notre barbarie, mais obéirent, comme Clive, au sentiment du devoir et du patriotisme. La garnison du dernier boulevard de la puissance britannique dans le Carnate se