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Mais, comme c’était un bibliophile plutôt qu’un philosophe (φιλόβιβλος μᾶλλον ἢ φιλόσοφος), il combla mal (ἀναπληρῶν οὐκ εὖ) les lacunes causées par les vers. Pendant que les manuscrits d’Aristote et de Théophraste pourrissaient à Scepsis, les successeurs de Théophraste, n’ayant en mains que quelques-uns des ouvrages exotériques, étaient réduits à cultiver la dialectique plutôt que la philosophie. Ceux qui vinrent après eux (c’est-à-dire sans doute les Péripatéticiens qui purent se servir de l’édition d’Apellicon) philosophèrent et aristotélisèrent mieux, bien que, la plupart du temps, ils fussent réduits à parler par conjecture à cause de la multiplicité des fautes de l’édition. Rome contribua à son tour au mauvais état des textes. En effet Sylla, après la prise d’Athènes et la mort d’Apellicon, transporta à Rome la bibliothèque de celui-ci. Là le grammairien Tyrannion, qui avait du goût pour Aristote, trouva moyen de se faire communiquer les manuscrits. Avec le concours de certains libraires il fit faire des copies. Mais les scribes étaient mauvais et les copies n’étaient même pas collationnées, comme il arrive quand on ne songe qu’à la vente.

Voici maintenant ce que Plutarque ajoute au récit de Strabon. À son retour d’Asie, où il était allé battre Mithridate, Sylla, parti d’Éphèse pour Athènes, prend la bibliothèque d’Apellicon, « dans laquelle se trouvaient la plupart des ouvrages d’Aristote et de Théophraste, qui jusqu’alors n’étaient pas clairement connus du grand nombre ». On dit que, la bibliothèque ayant été transportée à Rome[1], le grammairien Tyrannion donna ses soins à beaucoup des manuscrits et que par lui Andronicus de Rhodes ayant été mis en possession de copies en fit une édition et écrivit les tables (πίνακες) qui circulent maintenant. Les anciens Péripatéticiens, gens de mérite et de savoir, paraissent n’avoir connu qu’en petit nombre et inexactement les écrits d’Aristote et de Théophraste, à cause de l’ignorance des héritiers de Nélée.

Complétons ces deux récits par quelques renseignements

  1. Le retour de Sylla se place en 83.