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donc Aristote aurait dû reconnaître que les mathématiques échappent au syllogisme, puisque les essences mathématiques sont singulières ; il aurait dû prévoir et accueillir tout le fond des objections de Descartes contre le syllogisme. S’il n’en a rien fait, c’est, d’une part, qu’il n’a pas bien vu que les essences mathématiques sont singulières ; d’autre part et surtout, c’est que l’universel a chez lui un double sens, que ce n’est pas seulement ce qui s’étend à tous les membres d’une classe, que c’est aussi ce qu’une essence possède par soi. Cela revient à dire, encore une fois, qu’il passe subrepticement du point de vue de l’extension à celui de la compréhension. Mais il est acquis qu’en interprétant le syllogisme en extension, ce qui est sa doctrine consciente et avouée, il diminue singulièrement la portée de l’opération. Ce n’est plus du tout la portée sans limite qu’il lui conférait, lorsqu’il jugeait suffisant, pour définir le syllogisme de l’identifier avec l’acte d’enchaîner par une raison ou de médiatiser.

Cette remarque terminée, reprenons les choses où nous en étions arrivés après avoir exposé le principe du syllogisme et passons à la théorie logique de cette opération. Il s’agit, bien entendu, de ce qu’on appelle le syllogisme simple et catégorique. Nous avons écarté les syllogisme propositions modales et, quant aux syllogismes hypothétiques et disjonctifs, Aristote ne les connaît pas[1].

Nous avons dit que le principe du syllogisme, tel qu’il a été énoncé plus haut, est le principe même de la première figure. Il y a donc syllogisme de la première figure (σχῆμα) lorsque le moyen est dans l’extension du majeur (ou n’y est pas), et que le mineur est dans l’extension du moyen.

  1. Voir Zeller, p. 228, 2. Notons en passant que l’expression συλλογισμὸς ἐξ ὑποθέσεως ne signifie pas syllogisme hypothétique, mais syllogisme dont la conclusion s’appuie sur quelque postulat non prouvé (cf. Waitz, I, 427, ad An. pr., I, 23, 40 b, 25). — Pour l’exposition de la théorie logique du syllogisme ainsi délimitée, nous mettrons à profit une étude, très claire et généralement très exacte, de M. Fonsegrive, La théorie du syllogisme catégorique d’après Aristote, Annales de la Faculté des Lettres de Bordeaux, 3e  année, 1881, p. 395-410.