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La seconde opération sur les propositions est, selon Aristote, la conversion (ἀντιστροφή), par laquelle le sujet et l’attribut échangent leurs rôles (Bonitz, Ind., 67 a, 1). Bien qu’il y ait des sujets naturels et des attributs naturels[1], on peut pourtant, sans altérer la vérité, renverser l’ordre des deux termes, pourvu qu’on se conforme à certaines règles. Toute la théorie de la conversion, dans laquelle Aristote ne s’occupe d’ailleurs que des universelles et des particulières en laissant de côté les indéterminées et les singulières[2], est contenue dans un passage extrêmement dense et court des Premiers analytiques (I, 2, 25 a, 14-26). C’est ce passage qu’il s’agit de présenter sous une forme suffisamment développée[3]. Aristote commence par la conversion de l’universelle négative. La proposition Nul Β n’est Α se convertit en Nul Α n’est Β. Voici la démonstration d’Aristote. Si on nie que la converse soit Nul Α n’est Β, c’est-à-dire si l’on soutient que cette proposition est fausse, il faudra donc que la proposition vraie, la converse légitime, soit la contradictoire de Nul Α n’est Β, à savoir Quelque Α est Β. Appelons Tout Γ ce Quelque Α ; nous obtiendrons ainsi la proposition Tout Γ est Β. D’autre part, comme Tout Γ est Quelque Α, nous pouvons dire que Tout Γ est Α (c’est-à-dire quelque Α est Α). Nous pouvons donc constituer le syllogisme suivant[4] : Tout Γ est Α, Tout Γ est Β, donc Quelque Β est Α. Mais la conclusion de ce syllogisme est la contradictoire de la proposition à convertir Nul Β n’est Α ; la conclusion est donc fausse, et partant il faut que l’une des

    12, 27-28), qu’une des propositions déterminément est déjà vraie, savoir celle qui se trouvera réalisée fortuitement. La doctrine parfaitement fondée d’Aristote était une réponse aux Mégariques, qui croyaient trouver dans le principe de contradiction la base suffisante d’un fatalisme logique (cf. Zeller, ibid.).

  1. Cf. Trendelenburg, El. log. Ar.⁸, p. 68 (§ 8 déb.) : ce sont d’une part des choses singulières et qui ne peuvent être attributs, d’autre part les genres derniers (les catégories) qui, précisément parce qu’ils sont derniers, ne peuvent être sujet de quelque attribut plus général.
  2. Cf. Rondelet, op. cit., p. 108 sq.
  3. Ainsi que l’a fait Waitz, p. 374.
  4. C’est un syllogisme de la 3e figure, en dArAptI.