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LE PÈRE GRIGNION DE MONTFORT

Des causeuses des mieux mises,
Des libertins, des payens,
Qui tiennent là leurs assises,
Parmi très peu de chrétiens.

Voilà un tableau peu flatté assurément et plein de méchante humeur, mais qui jette un jour inattendu sur la vie des grandes villes de province au début du XVIIIe siècle ; c’est le commentaire des estampes satiriques et des gravures de modes du temps. Dans le même ordre d’idées, qui porte bonheur au Père Montfort, j’ai fait un emprunt plus sérieux à son cantique, en vers de douze pieds, qui porte ce long titre : Amende honorable au Très Saint Sacrement, pour tous les pechez qui se commettent dans les églises : il s’y trouve, à mon sens, le meilleur contingent que le missionnaire puisse apporter à notre Anthologie :

Tout reluit chez Monsieur, il est très bien meublé ;
L’église est dans l’oubli, l’autel est dépouillé,
Le pavé tout brisé, le toict sans couverture,
Les murs tous écroulez, et tous couverts d’ordure.

Si quelque chose est propre en la maison de Dieu,
C’est le banc de la dame ou du seigneur du lieu ;
Sur des murs tout crasseux ses armes sont bien peintes
Si l’on a de la foi, qu’on entre dans mes plaintes.

On voit, au lieu du nom du Seigneur immortel,
Les armes de Monsieur au milieu de l’autel,
Le prêtre et le mulet portent ses armoiries,
L’un l’honore à l’autel, et l’autre aux écuries.

Que de gens chez les grands pour leur faire la cour !
Leur maison en est pleine et la nuit et le jour ;