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ÉRATO, LIVRE VI.

raient de pénétrer du côté du Phase dans la Médie, et que les Spartiates partiraient d’Éphèse, se rendraient dans l’Asie supérieure, et que les deux armées se joindraient au même endroit. Les Lacédémoniens disent que Cléomène eut avec les Scythes, qui étaient venus à Sparte pour cette négociation, une très-grande liaison, et même plus intime qu’il ne convenait, et qu’il contracta avec eux l’habitude de boire du vin pur. Telle fut, selon les Spartiates, la cause qui le rendit furieux ; ils ajoutent que depuis ce temps, quand ils veulent boire du vin pur, ils se disent l’un à l’autre : Imitons les Scythes. C’est ainsi que les Spartiates parlent de la frénésie de Cléomène ; mais je pense qu’elle fut un effet de la colère des dieux, qui voulaient venger Démarate.

LXXXV. Les Éginètes n’eurent pas plutôt appris la mort de Cléomène, qu’ils envoyèrent à Sparte des députés pour accuser Léotychides au sujet de la détention de leurs otages à Athènes. Les juges, s’étant assemblés, décidèrent que les Éginètes avaient été traités indignement par Léotychides, et le condamnèrent à être remis entre leurs mains, pour qu’ils l’emmenassent en Égine, en la place des hommes qu’on leur retenait à Athènes. Les Éginètes se disposaient à exécuter cet arrêt, lorsque Théasides, fils de Léoprépès, citoyen distingué de Sparte, leur parla en ces termes : « Que voulez-vous faire, Éginètes ? Allez-vous donc emmener le roi de Sparte que vous ont livré ses concitoyens ? Si les Spartiates ont dans leur colère prononcé un tel jugement, ne craignez-vous pas, si vous le mettez à exécution, qu’ils n’entrent quelque jour dans votre pays, et qu’ils ne le détruisent entièrement ? » Là-dessus les Éginètes se désistèrent de leur entreprise ; mais ce fut à condition que Léotychides les suivrait à Athènes pour se faire rendre leurs citoyens.

LXXXVI. Ce prince, étant arrivé à Athènes, redemanda les otages qu’il y avait mis en dépôt. Les Athéniens, qui ne voulaient pas les remettre, temporisaient, sous prétexte que les deux rois les leur ayant confiés, il n’était pas juste de les rendre à l’un en l’absence de l’autre. Sur ce refus, Léotychides leur parla en ces termes : « Athéniens, prenez

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