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URANIE, LIVRE VIII.

afin de garder les ponts sur lesquels le roi devait passer. Lorsque les Barbares furent près de Zoster[1], ils prirent pour des vaisseaux les petits promontoires qui s’avancent dans la mer. Ils en furent tellement effrayés, qu’ils s’enfuirent en désordre ; mais, ayant enfin reconnu leur erreur, ils se réunirent et continuèrent leur route.

CVIII. Quand le jour parut, les Grecs, voyant l’armée de terre des Perses au même endroit, crurent que leurs vaisseaux étaient aussi à Phalère, et, s’imaginant qu’ils leur livreraient un autre combat naval, ils se disposèrent à se défendre ; mais lorsqu’ils eurent appris le départ de la flotte, ils résolurent sur-le-champ de la poursuivre. Ils le firent jusqu’à Andros ; mais, ne pouvant l’apercevoir, ils abordèrent à cette île, où ils tinrent conseil. Thémistocles conseilla de poursuivre l’ennemi à travers la mer Égée, et d’aller droit à l’Hellespont pour rompre les ponts. Eurybiades fut d’un avis contraire. Il représenta qu’en rompant les ponts on attirerait sur la Grèce le plus grand de tous les malheurs ; que, si le roi était intercepté et forcé de rester en Europe, il ne se tiendrait pas en repos, parce que, s’il s’y tenait, il ne pourrait ni réussir dans ses projets, ni retourner en Asie, et qu’il faudrait que son armée pérît de faim ; que si au contraire il tentait quelque entreprise, et s’y attachait fortement, toutes les nations et toutes les villes de l’Europe se joindraient à lui de gré ou de force ; enfin que la récolte annuelle des Grecs lui fournirait toujours des vivres. Il ajouta qu’il croyait que le roi, après la perte d’une bataille navale, ne resterait point en Europe ; qu’il fallait donc le laisser fuir jusqu’à ce qu’il fût arrivé dans ses États, et qu’alors on pourrait l’y attaquer, et qu’il les y exhortait. Cet avis fut approuvé par le reste des généraux péloponnésiens.

CIX. Thémistocles, ayant reconnu qu’il ne persuaderait

  1. « On dit que Latone étant enceinte du fait de Jupiter, la jalouse Junon la poursuivit par mer et par toute la terre ; que la douleur de l’enfantement l’ayant surprise dans notre pays, elle y détacha sa ceinture ; que cet endroit s’appelle par cette raison depuis ce temps-là Zoster (ceinture), et qu’étant ensuite passée dans l’île de Délos, elle accoucha de deux dieux jumeaux, Diane et Apollon. » (Joan. Siceliotes, Comment. mss. in Hermogenem.)