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HISTOIRE D’HÉRODOTE.

grandeur d’âme et son courage la portèrent à suivre les Perses, quoiqu’elle n’y fût contrainte par aucune nécessité. Elle s’appelait Artémise[1], était fille de Lygdamis, originaire d’Halicarnasse du côté de son père, et de Crète du côté de sa mère. Elle commandait ceux d’Halicarnasse, de Cos, de Nisyros et de Calydnes. Elle vint trouver Xerxès avec cinq vaisseaux les mieux équipés de toute la flotte, du moins après ceux des Sidoniens ; et parmi les alliés, personne ne donna au roi de meilleurs conseils. Les peuples soumis à Artémise, dont je viens de parler, sont tous Doriens, comme je le pense. Ceux d’Halicarnasse sont originaires de Trézen, et les autres d’Épidaure. Mais c’en est assez sur l’armée navale.

C. Le dénombrement achevé, et l’armée rangée en bataille, Xerxès eut envie de se transporter dans tous les rangs, et d’en faire la revue. Monté sur son char, il parcourut l’une après l’autre toutes les nations, depuis les premiers rangs de la cavalerie et de l’infanterie jusqu’aux derniers, fit à tous des questions, et ses secrétaires écrivaient les réponses. La revue des troupes de terre finie, et les vaisseaux mis en mer, il passa de son char sur un vaisseau sidonien, où il s’assit sous un pavillon d’étoffe d’or. Il vogua le long des proues des vaisseaux, faisant aux capitaines les mêmes questions qu’aux officiers de l’armée de terre, et fit écrire leurs réponses. Les capitaines avaient mis leurs vaisseaux à l’ancre environ à quatre plèthres du rivage, les proues tournées vers la terre, sur une même ligne, et les soldats sous les armes, comme si on eût eu dessein de livrer bataille. Le roi les examinait en passant entre les proues et le rivage.

CI. La revue finie, il descendit de son vaisseau, et envoya chercher Démarate, fils d’Ariston, qui l’accompagnait dans son expédition contre la Grèce. Lorsqu’il fut arrivé,

  1. Si l’on en croit Ptolémée, écrivain qui a mêlé beaucoup de fables parmi quelques vérités, Artémise, fille de Lygdamis, qui accompagna Xerxès dans son expédition contre la Grèce, devint amoureuse de Dardanus d’Abydos ; mais, s’en voyant méprisée, elle lui creva les yeux pendant qu’il dormait. Son amour n’ayant fait que croître par un effet de la colère des dieux, elle se rendit à Leucas par l’ordre de l’oracle, et, s’étant précipitée du haut du rocher, elle fut tuée et en on l’enterra. (Ptolémée, apud Phot., 492.)