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HISTOIRE D’HÉRODOTE.

un temple à Æacus, ils les attaquaient la trente-unième année, cette guerre aurait le succès qu’ils s’en promettaient ; au lieu que, s’ils la leur faisaient sur-le-champ, ils auraient beaucoup à souffrir dans cet intervalle, qu’ils feraient aussi beaucoup de mal aux Éginètes, mais qu’enfin ils les subjugueraient. Les Athéniens n’eurent pas plutôt eu communication de cet oracle, qu’ils élevèrent à Æacus le temple qui est à présent sur la place publique ; mais, voyant qu’il leur fallait contenir pendant trente ans le ressentiment des injures qu’ils avaient reçues, ils ne voulurent pas différer si longtemps.

XC. Une affaire que leur suscitèrent les Lacédémoniens fut un obstacle à la vengeance qu’ils méditaient. Les Lacédémoniens, instruits du manége des Alcméonides avec la Pythie, et des intrigues de celle-ci contre eux et contre les Pisistratides, en furent doublement affligés, et parce qu’ils avaient chassé d’Athènes leurs hôtes et leurs amis, et parce que les Athéniens ne leur en savaient aucun gré. Indépendamment de ces raisons, ils étaient encore animés par les oracles, qui leur prédisaient qu’ils auraient beaucoup à souffrir de la part des Athéniens ; oracles qu’ils avaient auparavant ignorés, et que Cléomène, qui les avait portés à Sparte, leur fit alors connaître. Ce prince avait enlevé ces oracles de la citadelle. Ils avaient auparavant appartenu aux Pisistratides ; mais les ayant laissés dans le temple de Minerve lorsqu’ils furent chassés, Cléomène s’en était emparé.

XCI. Quand les Lacédémoniens s’en virent les maîtres, et qu’ils se furent aperçus que les forces des Athéniens prenaient de nouveaux accroissements, et qu’ils n’étaient nullement disposés à leur obéir, venant alors à réfléchir que si ce peuple était libre, il tiendrait avec eux la balance égale, et que, s’il était retenu dans l’esclavage, il deviendrait prêt à obéir ; convaincus de la justesse de ces réflexions, ils firent venir Hippias, fils de Pisistrate, de Sigée sur l’Hellespont, où s’étaient réfugiés les Pisistratides. Hippias s’étant rendu à leur invitation, ainsi que les députés de leurs alliés, qu’ils avaient aussi mandés, les Spartiates leur parlèrent en ces termes : « Confédérés, nous