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THALIE, LIVRE III.

part son discours. Il n’était pas cependant, à mon avis, assez insensé pour s’imaginer qu’avec ses forces il pourrait l’emporter sur le roi ; mais il enviait à Syloson le bonheur de recouvrer sans peine la ville de Samos, et de la recevoir florissante, et sans qu’on y eût fait le moindre dégât. En irritant les Perses, il voulait affaiblir la puissance des Samiens, et ne les livrer qu’en cet état. Il savait bien, en effet, que, si les Perses étaient maltraités, ils s’aigriraient contre les Samiens. D’ailleurs il avait un moyen sûr pour se retirer de l’île quand il le voudrait. Il avait fait pratiquer sous terre un chemin qui conduisait de la forteresse à la mer. Et en effet il sortit de Samos par cette route, et mit à la voile. Pendant ce temps-là Charilée, ayant fait prendre les armes à toutes les troupes auxiliaires, ouvrit les portes, et fit une sortie sur les Perses, qui, bien loin de s’attendre à cet acte d’hostilité, croyaient que tout était réglé. Les auxiliaires tombèrent sur ces Perses de distinction, qu’ils trouvèrent assis, et les massacrèrent. Tandis qu’ils les passaient au fil de l’épée, le reste de l’armée perse vint au secours, et poussa les auxiliaires avec tant de vigueur, qu’ils furent contraints de se renfermer dans la forteresse.

CXLVII. Otanes s’était ressouvenu jusqu’alors des ordres que Darius lui avait donnés en partant, de ne tuer aucun Samien, de n’en réduire aucun en servitude, et de rendre l’île de Samos à Syloson, sans permettre qu’on y fit le dégât ; mais, à la vue du carnage qui s’était fait des Perses, il les oublia. Il ordonna à son armée de faire main basse sur tout ce qu’elle trouverait en son chemin, hommes et enfants, sans aucune distinction. Ainsi, tandis qu’une partie de ses troupes assiégeait la citadelle, les autres passèrent au fil de l’épée tous ceux qu’ils rencontrèrent, tant dans les lieux sacrés que dans les profanes.

CXLVIII. Mæandrius, s’étant sauvé de Samos, fit voile à Lacédémone. Lorsqu’il y fut arrivé avec les richesses qu’il avait emportées, il fit tirer de ses coffres des coupes d’or et d’argent, et ses gens se mirent à les nettoyer. Pendant ce temps-là, il alla trouver Cléomène, fils d’Anaxan-