Page:Hérodote - Histoire, trad. Larcher, tome 1, 1850.djvu/219

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
220
HISTOIRE D’HÉRODOTE.

mérite. Il est consacré à Latone, dans une grande ville située vers l’embouchure Sébennytique du Nil. On la rencontre en remontant de la mer par cette bouche du fleuve.

Cette ville s’appelle Buto. Je l’ai déjà nommée. On y voit plusieurs temples, celui d’Apollon et Diane, et celui de Latone, où se rendent les oracles. Ce dernier est grand ; ses portiques ont dix orgyies de haut. De tout ce que je vis dans l’enceinte consacrée à Latone, le temple de la déesse me causa la plus grande surprise. Il est d’une seule pierre en hauteur et en longueur ; les côtés en sont égaux. Chacune de ses dimensions est de quarante coudées[1]. Une autre pierre, dont les rebords ont quatre coudées, lui sert de couverture.

CLVI. De tout ce qu’on peut voir aux environs de l’enceinte consacrée à Latone, rien de plus admirable, à mon avis, que ce temple. L’île Chemmis occupe le second rang ; elle est dans un lac profond et spacieux, près du temple de Latone, à Buto. Les Égyptiens assurent que cette île est flottante : pour moi, je ne l’ai vue ni flotter ni remuer, et je fus fort surpris d’entendre dire qu’il y eut réellement des îles flottantes. On voit dans celle-ci une grande chapelle d’Apollon, avec trois autels. La terre y produit, sans culture, quantité de palmiers, et d’autres arbres tant fruitiers que stériles. Voici, selon les Égyptiens, la raison pour laquelle elle flotte.

Latone, l’une des huit plus anciennes divinités, demeurait à Buto, où est maintenant son oracle. Isis lui ayant remis Apollon en dépôt, elle le cacha dans cette île, qu’on appelle aujourd’hui l’île flottante, et qui autrefois était fixe et immobile ; elle le sauva dans le temps même qu’arrivait Typhon, qui cherchait partout le fils d’Osiris ; car ils disent qu’Apollon et Diane sont nés de Bacchus et d’Isis, et que Latone fut leur nourrice et leur conservatrice. Apollon s’appelle Orus en égyptien ; Cérès, Isis, et Diane, Bubastis.

  1. C’est-à-dire cinquante-cinq pieds, suivant M. d’Anville, ou cinquante-trois pieds huit lignes, comme le veut M. de Caylus, qui ne donne à la coudée qu’un pied trois pouces onze lignes. (L.)