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la composent, ne saurait avoir d’autre Morale ni d’autres droits que les leurs.

Si donc la vieille Morale disait : à Dieu et à ses lieutenants appartient le droit de justice ; quant à vous, individus, aimez vos ennemis ; lorsqu’on vous soufflette sur une joue, tendez l’autre ; lorsqu’on vous enlève votre tunique, donnez encore votre manteau ; vous ne sauriez trop vous abaisser, trop souffrir des autres ; laissez la justice à Dieu et, par votre humiliation, frayez-vous une route vers le ciel ; si dis-je la vieille Morale dit cela, vous, prêtresse de la Morale nouvelle, sortie de l’idéal nouveau, vous êtes au contraire tenue de dire à vos élèves : tant que vous ne connaissez pas la loi Morale, vous n’êtes ni bonnes ni méchantes ; quand vous la connaissez, par votre libre choix, vous pouvez être l’un ou l’autre. En vous est la force nécessaire pour triompher de l’exagération de vos instincts. Vous êtes les égales de tous ; cherchez à vous bien connaître, afin de remplir, s’il se peut, la fonction à laquelle vous appellent vos facultés ; ne souffrez pas, si cela vous est possible, qu’une incapacité vous supplante : vous vous le devez à vous-mêmes et au corps social. Créatures progressives, ne tentez pas de justifier vos fautes par votre faiblesse, car vous êtes obligées de vous améliorer et d’améliorer les autres. Votre devoir étant d’empêcher le mal en vous et hors de vous, vous ne devez ni commettre ni souffrir l’injustice et la méchanceté, car vous êtes responsables, non seulement du mal que vous faites et du bien que vous négligez d’accomplir, mais encore des vices d’autrui et du mal qui en résulte, si, pouvant les corriger ou les contenir, vous ne l’avez pas fait.

Et pour que cette morale ne rende pas vos élèves dures, peu