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L’auteur. Vous n’interdisez pas même les carrières où il faut de la force, où lon s’expose à des périls ?

La jeune femme. On n’interdit pas aux femmes d’être charpentiers, convreurs, et elles ne le sont pas, parce que leur nature s’y oppose ; c’est précisément parce que la nature s’y oppose, que je trouverais la Société peu raisonnable de s’en mêler. Ce qui est impossible, on n’a pas besoin de l’interdire et, si ce que l’on a déclaré impossible, se fait, c’est que c’était possible : or la Société n’a pas le droit d’interdire le possible à aucun de ses membres ; cela lui parût-il même excentrique, lorsqu’il est question de vocation.

L’auteur. Que chacun remplisse sa fonction privée à ses risques et périls : c’est bien ; mais n’y a-t-il pas certaines fonctions publiques qui ne conviennent pas aux femmes ?

La jeune femme. Nul ne le sait puisqu’on ne les développe pas pour les remplir ; et, en fût-il ainsi, linterdiciion serait inutile : le concours ferait justice de prétentions mal fondées.

L’auteur. Comment la femme sera-t-elle l’égale de l’homme dans le mariage ?

La jeune femme. Quand la personne des époux ne sera pas engagée par le mariage ; lorsque les engagements seront réciproques et que la femme ne sera pas traitée en mineure et absorbée par l’homme. Et il faut qu’il en soit ainsi :

Parce qu’il n’est pas licite d’aliéner sa personnalité ; qu’une semblable aliénation est immorale et nulle de soi ;

Parce que la femme, individu distinct, ne peut être sérieusement absorbée par l’homme, et qu’une loi est absurde quand elle repose sur une fiction et suppose une chose impossible ;