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II

suffira donc de remarquer les nuances particulières à chaque dialecte, et ces nuances sont à peu près semblables à celles qui distinguaient les anciens dialectes de la Grèce. Elles consistent principalement dans la terminaison des infinitifs des verbes, des singuliers et pluriels de quelques substantifs.

La terminaison régulière des infinitifs est en a et en i dans Léon et dans la basse Cornouaille, en an et en in en Tréguier et St-Brieuc ; en ô dans la haute Cornouaille, en ein dans le haut Vannes et en eiñ dans le bas Vannes. Ainsi on dit mala (moudre), meuli (louer) en Léon et dans la Basse-Cornouaille ; malan et meulin en Tréguier ; malô et meulo dans la Haute-Cornouaille ; malein et meulein dans le haut Vannes ; maleiñ et meuleiñ dans le bas Vannes, et ainsi des autres infinitifs réguliers.

Les substantifs terminés en eur en Léon, comme toeur (cou­vreur), le sont en er en Tréguier et en Basse-Cornouaille, toer, et our en Haute-Cornouaille, et en Vannes, toour. — Le pluriel de ces noms se termine partout en ien, toeurien (couvreurs), toé­rien, toourien, excepté dans le haut Vannes, où il se termine en ion, toourion, et dans le bas Vannes en ian, toourian.

Les pluriels terminés en ou en Léon et en Basse-Cornouaille, comme dans les mots pokou (bains), tadou (père), se terminent en o en Tréguier, poko, tado ; en ô en Haute-Cornouaille, pokô, tadô, et en eu en Vannes, pokeu, tadeu. À la fin des mots où les Léonais, par euphonie, mettent un z, que les Tréguerois et les Cornouaillais ne prononcent pas ou très-rarement, les Vannetais mettent h qu’ils aspirent faiblement ; ainsi les mots madelez (bonté), priedelez (mariage), se prononcent en Vannes, madeleh priedeleh.

On peut voir par cet aperçu que la différence des dialectes ne change rien au fond de la langue, la racine des mots n’est nullement altérée.

De tous ces dialectes, dit M. l’abbé Mahé[1], celui de Vannes

  1. Essai sur les antiquités du Morbihan (page 47).