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l’irréligion de l’avenir.

Kant plutôt que par Comte, n’affirme copondant rien à l’endroit des notions de Dieu et de l’immortalité ; il admet seulement l’existence du noumène inconnaissable, d’une « Réalité ultime qui gît derrière toutes les apparences et d’où sort l’harmonie du monde. » — « Alors que la divergence des croyances continue à s’accentuer, il semble nécessaire, dit M. Adler, de placer la loi morale là où elle ne peut être discutée, dans la pratique. Les hommes se sont si longtemps disputés sur l’auteur de la loi, que la loi même est restée dans l’ombre. Notre mouvement est un appel à la conscience, un cri pour plus de justice, une exhortation à plus de devoirs. « 

Le premier but que les associations réformatrices doivent poursuivre, selon M. Adler, c’est de réformer leurs membres. Aussi s’est-il hâté de fonder : lo une école du dimanche où l’on enseigne la morale, l’histoire des cultes les plus importants et quelque peu de philosophie de la religion ; 2o un Kindergarten public, organisé d’après la méthode Frœbel ; 3o une école ouvrière où les enfants sont admis à partir de trois ans jusqu’à neuf[1].

M. Adler a vu se grouper autour de lui d’abord des Juifs, ensuite bon nombre de personnes sans distinction de race, qui restent d’ailleurs entièrement libres dans leurs croyances personnelles, unies seulement par la bonne volonté et l’ardent désir de « régénérer l’humanité. » Tous les dimanches, les fidèles se réunissent pour entendre une conférence, puis se dispersent ; les membres seuls s’assemblent pour délibérer au sujet des œuvres fondées par l’association. Cette religion « à l’américaine », toute pratique, est acceptable pour le philosophe ; au fond ce n’est plus qu’une vaste société de tempérance complétée par une société de secours mutuels. On ne peut lui reprocher que d’avoir un caractère un peu trop positif et terre à terre, mais c’est certainement un des types possibles entre lesquels se partagera et se dispersera un jour la religion.


Certains partisans de la rénovation religieuse placent leur dernier espoir dans le socialisme. Les idées socialistes

  1. Les élèves trop indigents sont habillés et nourris ; l’instruction y est gratuite ; cette école compte aujourd’hui deux cent cinquante élèves, après avoir commencé avec huit : un musée industriel y est attaché. Ajoutons que chaque jour des visiteuses (district nurses) s’en vont soigner les malades des quartiers pauvres de New-York.