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PRÉFACE.

faire la part exacte des deux termes en présence, qui ne sont autres que l’habitude héréditaire ou ancestrale et l’habitude individuelle, l’une déjà incarnée dans les organes et l’autre acquise. Nous examinerons si les lois de la suggestion, récemment constatées par nos psycho-physiologistes, et dont tous les effets sont encore si imparfaitement connus, ne constituent pas un élément nouveau et ne doivent pas modifier les données du problème. Les découvertes modernes sur la suggestion nous semblent en effet capitales au point de vue de l’éducation, parce qu’elles permettent de constater de facto la possibilité de créer toujours dans un esprit, à tout moment de son évolution, un instinct artificiel capable de faire équilibre plus ou moins longtemps aux tendances préexistantes. Si cette introduction de sentiments nouveaux est possible par un moyen tout physiologique, elle doit être possible également par les moyens psychologiques et moraux. Ainsi les études récentes sur le système nerveux seront propres à corriger les préjugés nés de la science par une science plus complète. La suggestion, qui crée des instincts artificiels capables de faire équilibre aux instincts héréditaires, de les étouffer même, constitue une puissance nouvelle, comparable à l’hérédité ; or l’éducation n’est autre chose, selon nous, qu’un ensemble de suggestions coordonnées et raisonnées : on pressent dès lors l’efficacité qu’elle peut acquérir au point de vue à la fois psychologique et physiologique.