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Il se tut quelques instants, un peu surpris et embarrassé, puis lentement :

— Oui, je me suis trompé ce jour-là. Mais je suis sûr de ne pas me tromper dans l’avis très paternel que je te dois aujourd’hui.

— Dites toujours. J’en prendrai ce qu’il faudra.

— Tu es sur le point de te compromettre.

Elle se mit à rire, d’un rire trop vif, et complétant sa pensée :

— Avec M. Mariolle sans doute ?

— Avec M. Mariolle.

— Vous oubliez, reprit-elle, que je me suis compromise déjà avec M. Georges de Maltry, avec M. Massival, avec M. Gaston de Lamarthe, avec dix autres, dont vous avez été jaloux, car je ne peux pas trouver un homme gentil et dévoué sans que toute ma troupe se mette en fureur, vous le premier, vous que la nature m’a donné comme père noble et régisseur général.

Il répondit vivement :

— Non, non, tu ne t’es jamais compromise avec personne. Tu apportes, au contraire, dans tes relations avec tes amis beaucoup de tact.

Elle reprit crânement :

— Mon cher papa, je ne suis plus une petite fille, et je vous promets que je ne me compromettrai pas davantage avec M. Mariolle qu’avec les autres ; ne craignez rien. J’avoue cependant que c’est moi qui l’ai prié de venir ici. Je le trouve charmant, aussi intelligent et bien moins égoïste que les an-