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APPENDICE.

au prisonnier de s’approcher de la fenêtre à plus d’un mètre de distance. Si, par mégarde ou par accident, il enfreignait la règle, on tirait sur lui sans avertissement. Presque chaque jour on entendait le coup de feu de la sentinelle, et souvent un prisonnier tombait mort ou blessé. Un jour les officiers comptèrent jusqu’à quatorze coups tirés ainsi contre eux.

Mais nous avons des cruautés plus horribles encore à enregistrer ; nous avons les scènes de la famine à raconter.

La ration journalière d’un officier se composait d’un pain gros comme le poing, fait de farine de maïs, quelquefois de farine de froment, mais d’une qualité variable : il pesait un peu plus d’une demi-livre ; puis d’un morceau de bœuf d’environ deux onces. En été et au commencement de l’automne, les rations paraissent avoir été un peu moins insuffisantes ; mais jamais, ni pour la quantité, ni pour la qualité, elles n’ont été ce qu’elles auraient dû être pour maintenir le soldat en état de santé. Vers le milieu du dernier automne, ce système d’affamement intentionnel devint vraiment intolérable. Le pain était de l’espèce la plus grossière, renfermant la balle et le son ; la croûte en était si dure, que les prisonniers la disaient